La BPCO se caractérise essentiellement par une obstruction progressive des voies aériennes, qui apparaît sous forme d'une baisse du VEMS (volume expiré maximum pendant la première seconde, normalement > 75% de la capacité vitale). Il évolue vers l'hypoxémie, la polyglobulie, l'infection chronique, l'hypertension et le coeur pulmonaires. Les bronchodilatateurs ne permettent en général pas de gagner plus de 10% sur le VEMS. Sauf indications particulières, la chirurgie cardiaque élective est contre-indiquée lorsque:
- La capacité vitale forcée (CVF) est inférieure à 12 ml/kg;
- Le rapport VEMS/CVF est inférieur à 0.3 et le VEMS inférieur à 1 litre;
- L'hypoxémie et l'hypercapnie sont sévères: PaO2 < 50 mmHg, PaCO2 > 50 mmHg;
- La CVF, le FEV1 et le rapport VEMS/CVF sont tous trois inférieurs aux 50% de la valeur prédite.
Le test le plus fiable et le premier altéré dans l'évolution des bronchopathies obstructives est le FEV25-75% (débit expiratoire maximum de 25% à 75% de la CVF); sa valeur normale est 4.7 ± 1.1 L/sec. Il signe une obstruction des petites bronches et reste normal dans les maladies restrictives.
La plupart des fumeurs de cigarettes manifeste une diminution du flux expiratoire, et 10% d'entre eux ont un VEMS inférieur au 65% de la valeur prédite [2]. Comme la fumée est un facteur anamnestique fréquent chez les vasculaires, on rencontre souvent des malades de ce type en chirurgie coronarienne. La préparation préopératoire est d'autant meilleure que l'arrêt de la fumée est plus long.
- La tβ1/2 du CO est de 4-6 heures; 12 heures après la dernière cigarette, le taux de carboxyHb baisse de 6.5% à 1.1% [1]; la carboxyHb n'est pas différenciée de l'Hb native pas les saturomètres; les effets sympathicomimétiques de la nicotine ne durent que 20-30 minutes.
- L'hypersécrétion bronchique, la baisse du transport ciliaire, la broncho-constriction et l'immunodépression ne sont réversibles qu'à plus long terme: le taux de complications postopératoires ne baisse que si l'arrêt de la cigarette est d'au moins 8 semaines [3].
Anesthésie lors de BPCO
La ventilation en anesthésie doit tenir compte de la pathologie pulmonaire. Le mode ventilatoire préférentiel est le mode en pression contrôlée. Il faut rechercher:
- Volume courant élevé: 12-15 ml/kg;
- Flux inspiratoire bas;
- Pression de crête basse (risque de barotraumatisme);
- Fréquence basse (6-8/min) pour permettre un retour veineux adéquat au coeur droit et un temps expiratoire suffisant;
- Humidification et réchauffement des gaz inspirés.
Ces contraintes sont parfois incompatibles. S'il faut choisir, il est plus sûr de diminuer le volume courant que d'augmenter la pression de ventilation. La technique d'anesthésie cardiaque elle-même n'a pas lieu d'être modifiée. Cependant, le risque de rigidité musculaire lors de l'induction au fentanyl est grave parce que la réserve ventilatoire est très faible; les patients désaturent très rapidement. Par sécurité, une curarisation prompte au vécuronium ou au rocuronium est recommandée. La plupart de ces malades a besoin d'une assistance ventilatoire prolongée dans le postopératoire et doit être très profondément endormie pour minimiser la stimulation de l'arbre bronchique et de la vasoconstriction pulmonaire. Les agents vasodilatateurs artériels (isoflurane, nitroprussiate, etc) peuvent atténuer la vasoconstriction pulmonaire hypoxique et de ce fait augmenter l'effet shunt intrapulmonaire (hypoxémie). L’anesthésie combinée avec une péridurale cervicale ou thoracique haute peut être une solution chez les malades emphysémateux qui n’ont pas de réserve ventilatoire, mais la situation est plus difficile chez les ceux qui produisent beaucoup de sécrétion et qui s’encombrent facilement dans le postopératoire après extubation.
Bronchopneumopathie obstructive (BPCO) |
Sont considérés comme une contre-indication à la chirurgie cardiaque élective en CEC :
- Capacité vitale forcée (CVF) < 12 mL/kg
- VEMS < 1 L, VEMS/CVF < 0.3
- PaO2 < 50 mmHg, PaCO2 > 50 mmHg
- FEV1 < 50% de valeur prédite
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© CHASSOT PG, Septembre 2007, dernière mise à jour, Décembre 2018
Références
- KAMBAM JR, CHEN HL, HYMAN SA. Effect of short-term smoking halt on carboxyhemoglobin levels and P50 values. Anesth Analg 1986; 65:1186-8
- STOELTING RK, DIERDIRF SF. Anesthesia and coexisting diseases, 3rd edition. New York, Churchill Livingstone, 1993, pp137-148
- WARNER MA, DIVERTIE MB, TINKER JH. Preoperative cessation of smoking and pulmonary complications in coronary artery bypass patients. Anesthesiology 1984; 60:380-3