En combinant les mesures échocardiographiques de dimensions et de flux avec la mesure de la pression artérielle invasive et de la durée d'éjection, on a accès à des données hémodynamiques qui incluent les conditions de charge dans les calculs et qui peuvent ainsi mieux cerner la contractilité myocardique proprement dite. En effet, une valeur de FE à 55%, par exemple, ne représente pas la même force contractile lorsque la pression artérielle systolique est de 180 mmHg ou de 90 mmHg. Il en est de même entre un malade qui souffre de sténose aortique et un autre qui souffre d'insuffisance mitrale. L'idée d'inclure les conditions de charge est précisément de prendre en compte ces données.
Indices incluant la postcharge
Le stress est une force appliquée sur une masse. Dans le cas du VG, la force intrapariétale (σ) équilibre en permanence la force de pression sur la paroi (P en g/cm2). En systole, elle représente la force générée par le ventricule pour éjecter un volume systolique donné. Bien qu’il soit encore sensible aux conditions de remplissage, le stress de paroi exprime le travail ventriculaire en fonction de la postcharge.
Dans un ellipsoïde comme le VG, il existe trois forces perpendiculaires les unes aux autres : le stress radial σr (plan équatorial), le stress circonférentiel σc (plan tangentiel) et le stress médidional σm (plan longitudinal). Ce dernier est le plus simple à calculer [10]. Puisque la force intrapariétale (σ) du VG est en équilibre avec la force de pression (P), on obtient : σm • π (Re2 - Ri2) = P • π Ri2, où Re et Ri sont les rayons externe (épicardique) et interne (endocardique) de la paroi. D’où la valeur du stress après transformation mathématique pour un ellipsoïde : σm = (P • D) / 4 h (1 + [h / D]). Pour intégrer les différentes épaisseurs du VG selon la paroi mesurée, on remplace les rayons par les surfaces en court axe (Sepi : surface épicardique, Sendo : surface endocardique). La pression est transformée de g/cm2 en mmHg. On obtient alors :
σ = 1.35 • P • [ (Sepi - Sendo ) / Sendo ] • 103 (dynes/cm2)
Le stress méridional normal (mesuré en court axe) est de 85 • 103 dynes/cm2, alors que le stress circonférentiel (mesuré en long axe) est de 220 • 103 dynes/cm2, soit 2.6 fois plus élevé. Quoique le VG soit un ellipsoïde, la tension de paroi se définit habituellement en clinique par la loi de Laplace pour une sphère, qui a l’avantage d’être simple et utilisable même si elle ne correspond pas à la géométrie du ventricule.
σ = (P • r) / 2 h où: P: pression intraventriculaire
r: rayon de la cavité
h: épaisseur de la paroi
La tension de paroi maximale est générée pendant la contraction isovolumétrique, puis diminue régulièrement pendant l’éjection parce que la cavité ventriculaire se rétrécit et la paroi s'épaissit ; en fin de systole, le stress est la moitié de sa valeur maximale. Pour obtenir le stress maximal, on combine donc la mesure du pic de pression systolique avec les mesures dimensionnelles prises en télédiastole, puisque ce sont celles de la période de contraction isovolumétrique [8].
σ = (PAsyst • Dtd ) / 4 h (D : diamètre du VG, soit 2r)
En l’absence de pathologie aortique, la pression artérielle systémique est assimilée à la pression intraventriculaire. L'épaisseur de paroi (normal : < 1.2 cm en diastole) peut être malaisée à déterminer, car l'épicarde est parfois mal identifiable ; on la mesure au niveau du septum ou de la paroi inférieure (court axe ou long axe transgastriques du VG) ; la mesure est plus fiable en mode TM. Lorsque le ventricule se dilate et/ou que son épaisseur diminue, le stress de paroi pour obtenir la même pression systolique augmente : il est multiplié par un facteur de 5 lorsque le diamètre du ventricule double et que son épaisseur diminue de 25%, ce qui est le cas dans une insuffisance cardiaque modérée. Un VG dilaté doit donc fournir un travail beaucoup plus élevé pour développer la même hémodynamique. L’ETO permet non seulement de le quantifier, mais aussi d'alerter le clinicien lorsqu'il découvre une dilatation ventriculaire, quelle qu'en soit la cause. Une FE de 55% ou une hémodynamique normale ne traduisent donc pas le travail que le ventricule doit fournir si ses dimensions sont inconnues.
Pour disposer d’un indice simple construit avec des mesures courantes mais incluant la résistance à l'éjection, on peut utiliser diverses combinaisons arithmétiques entre la fonction ventriculaire systolique et la postcharge, sans tenir compte du temps réel auquel correspondent ces mesures. L’évolution de cet indice au cours d'une anesthésie est plus significative que sa valeur absolue. On peut citer quelques exemples parmi les nombreuses combinaisons imaginées [1,3,6,7].
Indices incluant la postcharge
Le stress est une force appliquée sur une masse. Dans le cas du VG, la force intrapariétale (σ) équilibre en permanence la force de pression sur la paroi (P en g/cm2). En systole, elle représente la force générée par le ventricule pour éjecter un volume systolique donné. Bien qu’il soit encore sensible aux conditions de remplissage, le stress de paroi exprime le travail ventriculaire en fonction de la postcharge.
Dans un ellipsoïde comme le VG, il existe trois forces perpendiculaires les unes aux autres : le stress radial σr (plan équatorial), le stress circonférentiel σc (plan tangentiel) et le stress médidional σm (plan longitudinal). Ce dernier est le plus simple à calculer [10]. Puisque la force intrapariétale (σ) du VG est en équilibre avec la force de pression (P), on obtient : σm • π (Re2 - Ri2) = P • π Ri2, où Re et Ri sont les rayons externe (épicardique) et interne (endocardique) de la paroi. D’où la valeur du stress après transformation mathématique pour un ellipsoïde : σm = (P • D) / 4 h (1 + [h / D]). Pour intégrer les différentes épaisseurs du VG selon la paroi mesurée, on remplace les rayons par les surfaces en court axe (Sepi : surface épicardique, Sendo : surface endocardique). La pression est transformée de g/cm2 en mmHg. On obtient alors :
σ = 1.35 • P • [ (Sepi - Sendo ) / Sendo ] • 103 (dynes/cm2)
Le stress méridional normal (mesuré en court axe) est de 85 • 103 dynes/cm2, alors que le stress circonférentiel (mesuré en long axe) est de 220 • 103 dynes/cm2, soit 2.6 fois plus élevé. Quoique le VG soit un ellipsoïde, la tension de paroi se définit habituellement en clinique par la loi de Laplace pour une sphère, qui a l’avantage d’être simple et utilisable même si elle ne correspond pas à la géométrie du ventricule.
σ = (P • r) / 2 h où: P: pression intraventriculaire
r: rayon de la cavité
h: épaisseur de la paroi
La tension de paroi maximale est générée pendant la contraction isovolumétrique, puis diminue régulièrement pendant l’éjection parce que la cavité ventriculaire se rétrécit et la paroi s'épaissit ; en fin de systole, le stress est la moitié de sa valeur maximale. Pour obtenir le stress maximal, on combine donc la mesure du pic de pression systolique avec les mesures dimensionnelles prises en télédiastole, puisque ce sont celles de la période de contraction isovolumétrique [8].
σ = (PAsyst • Dtd ) / 4 h (D : diamètre du VG, soit 2r)
En l’absence de pathologie aortique, la pression artérielle systémique est assimilée à la pression intraventriculaire. L'épaisseur de paroi (normal : < 1.2 cm en diastole) peut être malaisée à déterminer, car l'épicarde est parfois mal identifiable ; on la mesure au niveau du septum ou de la paroi inférieure (court axe ou long axe transgastriques du VG) ; la mesure est plus fiable en mode TM. Lorsque le ventricule se dilate et/ou que son épaisseur diminue, le stress de paroi pour obtenir la même pression systolique augmente : il est multiplié par un facteur de 5 lorsque le diamètre du ventricule double et que son épaisseur diminue de 25%, ce qui est le cas dans une insuffisance cardiaque modérée. Un VG dilaté doit donc fournir un travail beaucoup plus élevé pour développer la même hémodynamique. L’ETO permet non seulement de le quantifier, mais aussi d'alerter le clinicien lorsqu'il découvre une dilatation ventriculaire, quelle qu'en soit la cause. Une FE de 55% ou une hémodynamique normale ne traduisent donc pas le travail que le ventricule doit fournir si ses dimensions sont inconnues.
Pour disposer d’un indice simple construit avec des mesures courantes mais incluant la résistance à l'éjection, on peut utiliser diverses combinaisons arithmétiques entre la fonction ventriculaire systolique et la postcharge, sans tenir compte du temps réel auquel correspondent ces mesures. L’évolution de cet indice au cours d'une anesthésie est plus significative que sa valeur absolue. On peut citer quelques exemples parmi les nombreuses combinaisons imaginées [1,3,6,7].
- Le rapport pression / surface systolique établi entre la pression artérielle systolique (PAs) et la surface (S) télésystolique : PAs / Sts (normal : 25-40 mmHg/cm2).
- Le rapport pression / diamètre télésystolique : PAs / Dts (mesure en mode TM).
- Le produit de la fraction d'éjection (FE) et de la pression artérielle moyenne (PAM) : PAM • FE (normal : 40-70 mmHg).
- Le produit de la vélocité de racourcissemnt circonférentiel (Vcf) et de la pression artérielle systolique (PAs) : PAs • (FRcirc / Téj) (normal > 100 mmHg/s).
- Le rapport entre le stress de paroi (σ) et la vélocité de raccourcissement (Vcf); valeurs normales: σ = 55 g/cm2, Vcf = 1.2.
Elastance maximale
L'enregistrement de la pression et du volume ventriculaires permet de figurer une famille de boucles pression-volume (P/V) qui représentent le status fonctionnel du ventricule sous différentes conditions de précharge (voir Figure 25.171). Lorsque cette dernière varie, l'ensemble des points télésystoliques se déplace sur une quasi-droite appelée élastance télésystolique (Ets) ou élastance maximale (Emax), qui est indépendante de la postcharge et qui est un excellent reflet de la contractilité myocardique (normal : 5-8 mmHg/mL). Avec les techniques échocardiographiques de définition automatique du contour endocavitaire (ABD: Automatic Border Detection) et l'enregistrement simultané informatisé de la pression artérielle invasive, il devient possible de produire des séries de points pression-surface en temps réel et d'en déduire la courbe d'élastance du patient (Figure 25.180) [2]. En effet, il s'avère que la bloucle pression-surface, même si elle est de surface inférieure à la boucle pression-volume, donne la même famille de points télésystoliques pour définir la pente de l'élastance. Cette technique ne nécessite qu'une sonde ETO, un cathéter artériel fémoral (plus proche de la pression aortique que l’artère radiale) et un programme informatique pour synchroniser les données, mais elle implique des manipulations contrôlées de la précharge pour construire la courbe d'Emax à partir d'une famille de bloucles pression/surface : occlusion de la veine cave inférieure avec un ballon ou administration de nitroglycérine pour baisser la précharge, perfusion d’un expandeur plasmatique pour l’augmenter. C'est plutôt une technique de recherche clinique qu’une méthode de surveillance des patients en salle d'opération, mais elle offre la possibilité d’investiguer la contractilité de manière isolée.
Figure 25.180 : Boucles pression-surface construites à partir de l'enregistrement continu de la pression artérielle (A) et de la surface du VG (B) par la technique de la détection automatique des contours de la cavité ventriculaire. C : évolution en continu de la surface ventriculaire. D : boucles pression / surface d'un malade. Courbes traitillées: enregistrements de la pression et du volume par un cathéter à conductance dans le VG ; courbes pleines: enregistrement de la surface à l'ETO et de la pression dans l'artère fémorale. La pente de leurs points télésystoliques, ou élastance maximale (Emax), est identique [2].
Puissance éjectionnelle
La puissance éjectionnelle maximale (PWRmax) est un indice de contractilité plus utilisable dans le quotidien. La puissance d'une pompe est le produit de la pression fournie (P en g/cm2) et du volume éjecté par unité de temps (débit Q en cm3/s) ; c’est l’équivalent d’un travail (g • cm) par unité de temps (s) [4]. Dans le cas du VG, il s'agit du produit de la pression du VG et du flux aortique; on peut remplacer la pression intraventriculaire par la pression artérielle systolique; le flux aortique est le produit de la surface de la valve aortique et de la vélocité maximale du sang en systole à travers la valve :
PWR = PAs • (SAo • VmaxAo) (mmHg • cm3 / s)
On obtient un résultat en watt en multipliant le résultat par (1.333 • 10-4). Cette valeur, qui est indépendante de la postcharge, peut être rendue indépendante de la précharge en divisant le résultat par une mesure de remplissage télédiastolique, par exemple le volume télédiastolique du VG: PWR / Vtd2 [5]. Le calcul pratique est démontré dans la Figure 25.181. La PWR se révèle un bon indice de contractilité pour l'analyse des effets hémodynamiques des agents d'anesthésie ou des variations brusques de postcharge (clampage aortique, par exemple), car elle permet de différencier la contractilité des conditions de charge et de fréquence [9].
En hémodynamique, la puissance éjectionnelle est calculée par la formule : PAM • DC / 451 (pression artérielle moyenne x débit cardiaque / facteur de correction pour obtenir un résultat en watt). La valeur est un peu plus basse que celle calculée à l’écho (0.5-1.0 W/m2).
Figure 25.181 : Calcul de la PWRmax par ETO. A: la surface de la valve aortique est mesurée par planimétrie en court-axae basal (40°); S = 2.1 cm2. B: le flux aortique à travers la valve est mesuré par voie transgastrique (120°); la Vmax est 130 cm/s. C: mesure la pression artérielle systolique au niveau du cathéter artériel; la PAsyst est 120 mmHg. D: la surface télédiastolique du VG par la technique de Simpson est de 35.8 cm22 cette valeur sera élevée au carré et placée au dénominateur pour rendre le résultat indépendant de la précharge: PWR = [ (S • VmaxAo) • TAsyst ] / VTD2. Dans le cas présent, la valeur de la puissance éjectionnelle maximale est 2.9 10-4 w/mL2.
Ces indices ne sont pas d'utilisation courante en pratique clinique. Ils attirent cependant l'attention sur deux éléments très importants dans l'évaluation de la fonction systolique du ventricule gauche.
- La dimension; plus la taille du VG grandit, plus le travail qu'il doit fournir pour la même prestation augmente. En hémodynamique, big is bad !
- La postcharge; l'impédance à l'éjection conditionne la performance du VG et l'oblige à fournir plus ou moins d'énergie pour assurer le débit cardiaque. La pression artérielle systolique en est une bonne approximation.
Même sans calcul sophistiqué, ces deux éléments doivent toujours être pris en compte lorsqu'on mesure la fonction du ventricule.
© CHASSOT PG, BETTEX D. Mars 2011, Avril 2019; dernière mise à jour, Mars 2020
Références
Indices incluant les conditions de charge |
Tension de paroi maximale en systole: σ = (PAsyst • Dtd) / 4 h Elastance maximale Puissance éjectionnelle: PWR = PAs • (SAo • VmaxAo) Indices combinés: PAM • FAC, PAM • Vcf Ces indices démontrent l'importance de tenir compte des dimensions du ventricule et de la pression artérielle lors de l'évaluation de la fonction du VG. |
© CHASSOT PG, BETTEX D. Mars 2011, Avril 2019; dernière mise à jour, Mars 2020
Références
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- GORCSAN J, DENAULT A, MANDARINO WA, et al. Left ventricular pressure-volume relations with transesophageal echocardiography automated border detection: comparison with conductance-catheter technique. Am Heart J 1996; 131:544-52.
- GREIM CA, ROEWER N, SCHULTE AM ESCH J. Assessment of changes in left ventricular wall stress from end-systolic pressure-area product. Br J Anaesth 1995; 75:583-7
- KASS DA, BEYAR. Evaluation of contractile state by maximal ventricular power divided by the square of end-diastolic volume. Circulation 1991; 84:1698-708
- MANDARINO WA, PINSKY MR, GORCSAN J. Assessment of left ventricular contractile state by preload-adjusted maximal power using echocardiographic automated border detection. J Am Coll Cardiol 1998; 31:861-8
- O'KELLY BF, TUBAU JF, KNIGHT AA, et al. Measurement of left ventricular contractility using transesophageal echocardiography in patients undergoing coronary artery bypass surgery. Am Heart J 1991; 122:1041-9
- PARKER MM, OGNIBENE FP, PARILLO JE. Peak systolic pressure/end-systolic volume ratio, a load-independent measure of ventricular function, is reversibly decreased in human septic shock. Crit Care Med 1994; 22:1955-9
- QUINONES MA. Non-invasive quantification of left ventricular wall stress. Validation of the method and application to assessment of chronic pressure overload. Am J Cardiol 1980; 45:782-9
- SCHMIDT C, ROOSENS C, STRUYS M, et al. Contractility in humans after coronary artery surgery. Anesthesiology 1999; 91:58-70
- VUILLE C, WEYMAN AE. Left ventricle I: General considerations, assessment of chamber size and function. In: WEYMAN AE, ed. Principles and practice of echocardiography. Philadelphia: Lea & Febiger, 1994, 575-624